Dans le jeu vidéo, le temps est au retour des grands anciens, via le développement des services de téléchargement de « vieux » jeux vendus à l’unité et les sorties fréquentes de compilations à thèmes (une série, un genre, un éditeur, de Sega à SNK, d’Activision à Konami). Les trois consoles de dernière génération s’apprêtent même à accueillir un tout nouveau Mega Man 9 dont les développeurs se sont délibérément astreints à respecter les contraintes techniques des machines d’il y a 20 ans. Certains se saisissent au contraire de grands classiques pour leur offrir une nouvelle jeunesse, tel l’éditeur japonais Taito, qui a livré cet été ses dernières relectures en date de deux titres légendaires. Le plus curieux étant que celles-ci semblent le fruit de démarches presque opposées.
Tous ceux qui ont fréquenté les salles d’arcade au milieu des années 80 se souviennent sans doute d’Arkanoid, clinquant casse-brique qui ressuscita le genre inauguré par Breakout en 1976 et alors bien passé de mode, grâce à l’introduction de capacités variées (la raquette peut s’élargir, ou tirer, ou bloquer la balle…) et à sa présentation spectaculaire. Résultat : malgré son principe daté, Arkanoid fut l’un des jeux les plus excitants de son époque. Le paradoxe est là : ce que les auteurs d’Arkanoid DS visent aujourd’hui ressemble beaucoup à ce qu’ont réussi en leur temps les créateurs du titre original. On n’en est que plus surpris de découvrir un jeu terne, peu imaginatif et, ainsi épuré, presque plus old school dans l’esprit que son modèle de 1986. Les variations (défis, duels, mode en ligne) sont certes au rendez-vous, mais le tout paraît froid et sans âme. Il est vrai, aussi, qu’avec Nervous Brickdown, le casse-brique moderne est né l’an dernier. Et la comparaison ne tourne pas en faveur de cet Arkanoid DS entre deux âges.
L’affaire est tout autre avec Space Invaders Extreme, réinvention d’un jeu nettement plus ancien mais qui profite pleinement du point de vue tranché que ses créateurs ne craignent pas d’afficher. Les rangées d’envahisseurs descendant du haut de l’écran sont bien là. Ils sont désormais de plusieurs types, qui réagissent de manières diverses à nos tirs et libèrent des bonus variés, ce qui enrichit assurément l’expérience. Mais les auteurs de cette mouture Extreme ont surtout retenu que Space Invaders avait toujours été une affaire rythmique (esquiver les projectiles ennemis, y répondre instantanément) et qu’il était en 1978 le plus électrisant des jeux vidéo. Pour conclure qu’il devait en être de même en 2008. Reposant sur une dynamique changeante et sur une utilisation du son qui rappelle les expériences de Tetsuya Mizuguchi (Rez, Lumines) et Masahiro Sakurai (Meteos), le jeu étonne, effraie, éblouit, fascine, réjouit. Space Invaders a connu bien des variantes depuis sa création par Tomohiro Nishikado il y a 30 ans. La plus aboutie de toutes vient de nous parvenir.
(Paru dans Les Inrockuptibles n°667, 9 septembre 2008)
Arkanoid DS (Taito), sur DS
Space Invaders Extreme (Taito), sur DS, PSP et Xbox 360
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