Le joueur connaît la chanson : tous les ans, les gros éditeurs publient de nouvelles versions de leurs jeux à succès ressemblant à s’y méprendre à celles des années précédentes. Mais la série Burnout fait exception à la règle : de saison en saison, ses auteurs britanniques se sont attachés à réinventer ce qui n’était à l’origine qu’un jeu de course arcade (expérience immédiatement gratifiante, marge de progression considérable) un peu plus brillant que les autres. Et, peu à peu, Burnout est devenu autre chose. Burnout Revenge est-il encore un jeu de course ? Par sa prise en main, par certaines des épreuves qu’il propose, oui, bien sûr. Mais là où les rois du genre des années 80 (Out Run) et 90 (Ridge Racer) carburaient à l’ivresse de la vitesse, Burnout Revenge lui substitue la jouissance de la puissance. Le goût du crash, un appétit de destruction. Les autres voitures ne sont plus des obstacles à éviter mais des cibles à percuter.
Un signe des temps ? Peut-être. La fluidité, la route à perte de vue et la présence assez beauf d’une blonde en guise d’accessoire posé sur le siège passager d’Out Run ont laissé place à un espace encombré, une temporalité fragmentée, une déshumanisation forcenée. Le joueur s’identifie désormais à une masse de tôle, à une machine lancée contre les autres machines – quand bien même l’action prendrait place dans de flamboyantes cités réalistes. Crépitant de vulgarité stylée, Burnout Revenge est une manière de jeu punk ultra-commercial, presque un GTA de la course automobile, un truc théoriquement irrécupérable et pourtant récupéré avant même sa naissance. Est-ce qu’on aime ça ? Oui, et puis non, et puis si, quand même, inévitablement.
(Paru dans Les Inrockuptibles n°516, 19 octobre 2005)
Burnout Revenge (Criterion / Electronic Arts), sur PS2, Xbox et Xbox 360
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