Sex and the City

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On avait failli se faire avoir par son titre, trop programmatique pour ne pas dissimuler autre chose. Sex and the City. Le sexe et la ville. Comprendre : pour la femme blanche new-yorkaise, trentenaire ou à la limite quadra, plutôt friquée et éduquée, au tournant du millénaire et un Cosmopolitan (le cocktail plutôt que le magazine) à la main. La série de Darren Star n’est pourtant pas (seulement) une étude socio-psycho-sexologique mais, plus profondément, une tentative à la fois modeste (format sitcom oblige) et flamboyante de réactualiser la comédie romantique, d’en mettre à l’épreuve (du temps qui passe, des lieux qui se transforment, des mœurs qui mutent – ou pas tant que ça) les mécanismes et les figures-clés avec autant d’esprit que de persévérance.

Ici, tout part et tout revient à l’écriture – des intrigues, de la chronique que Carrie Bradshaw tient dans un magazine. Et la véritable nouveauté, le côté visionnaire de la série (pré-Facebook, pré-Twitter) est sans doute là : dans sa mise en scène sérielle d’un devenir-récit de la vie (amoureuse, pour commencer) et, simultanément, dans le devenir-vie de ce qui s’écrit et se partage – ici, sur le registre de la camaraderie féminine, entre BFF chacune parfaite dans son rôle auto-construit. Sex and the City peut ainsi se voir comme un exposé sentimental et sans complexe, littéraire et glitter, sur les relations revues et corrigées, exaltantes mais contrariées, entre les mots et le cœur, ou le cul, autant sinon plus qu’entre les femmes et les hommes. Girls, entre autres, saura s’en souvenir – et nous aussi.

(Paru dans Les Inrockuptibles, hors-série « 120 séries indispensables », mars 2014)

Sex and the City (1998-2004), série créée par Darren Star

Erwan Higuinen

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