Endless Ocean

EndlessOcean

Contrairement à ses contemporains plus tapageurs, Endless Ocean ne laissera pas le souvenir de combats homériques ou d’explosions étourdissantes. Dans la mémoire du joueur se graveront plutôt la vision presque suffocante du lent passage d’un cachalot, la danse hypnotique d’une majestueuse raie manta ou la découverte au fond de l’océan d’une grotte sombre et mystérieuse. Un peu occulté par la charge des blockbusters de fin d’année, Endless Ocean mérite mieux que le relatif anonymat qui a accompagné sa sortie au début du mois de novembre. Pour ses créateurs du studio japonais Arika, cette simulation de plongée sous-marine marque l’aboutissement d’une démarche qui avait déjà donné naissance aux deux Everblue sur PlayStation 2. Du côté du joueur, c’est une expérience merveilleuse portée par un game design qui trouve l’équilibre idéal entre l’utilisation de principes éprouvés du jeu vidéo et la mise en place d’une structure ouverte, propice à l’improvisation rêveuse.

Concrètement, à partir du pont d’un bateau, le joueur reçoit une série de propositions de missions qu’il peut aussi bien accepter que remettre à plus tard : servir de guide à un client désireux de découvrir les fonds marins, traquer en vue de la photographier telle ou telle espèce de poisson… Puis vient le moment de plonger, seul, ou en compagnie d’un dauphin que l’on aura peu à peu apprivoisé, ou encore, via Internet, avec un camarade possédant le même jeu. Alors commence l’éblouissement : avec une interface simplifiée grâce à un usage avisé de la Wiimote, le monde des profondeurs, magnifiquement recréé, s’offre à nous généreusement. Le plaisir éminemment sensuel provoqué par Endless Ocean naît du sentiment d’existence autonome et secrète autant que de disponibilité totale de cet écosystème virtuel, que les auteurs du jeu parviennent à rendre à la fois étranger (car radicalement non humain) et accueillant.

L’élément liquide est curieusement devenu une composante récurrente des essais vidéoludiques atypiques (voir Electroplankton sur DS, flOw sur PS3). Mais la grande idée des auteurs d’Endless Ocean consiste à s’appuyer sur une structure de jeu classique (les missions, donc) tout en assouplissant celle-ci autant que possible, pour nous offrir à la fois un jeu et le monde dans lequel il prend place. Libre ensuite à chacun de l’aborder comme cela lui chante, en respectant la trame narrative ou en partant à l’aventure. Pour s’approprier cet objet ludique joliment malléable qui se révèle bien vite ensorcelant.

(Paru dans Les Inrockuptibles n°633, 15 janvier 2008)

Endless Ocean (Nintendo), sur Wii

Erwan Higuinen

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